Le 18 septembre, le CHU de Caen Normandie, en partenariat avec l’association Cap’Ados et l'École des parents et des éducateurs du Calvados (EPE14), lance son premier atelier de théâtre-forum à destination des jeunes victimes de harcèlement. Retour sur une initiative originale et inédite.

« Il existe différents dispositifs de prévention contre le harcèlement, en collèges et lycées, mais quasiment aucun sur la prise en charge des victimes », annonce Marjorie Roques, psychologue et maître de conférences à l’université de Caen (LPCN) et spécialiste de la violence à l’adolescence. Ce constat l’a conduite à imaginer un projet original, en partenariat avec l’association Cap’Ados, qui s’intéresse à la santé mentale des jeunes. « Après une étude menée auprès de victimes et de leurs familles, nous avons imaginé une méthodologie pour les aider à trouver des solutions face aux situations de harcèlement et redevenir acteurs de leur vie », ajoute le Dr Fabian Guénolé, président de l’association et chef du service de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent du CHU de Caen Normandie.

Et rien de mieux que le théâtre-forum pour initier une approche indirecte de cette problématique. « Le théâtre-forum, également appelé théâtre de l’opprimé, met en scène des situations conflictuelles de harcèlement devant les jeunes, explique Marjorie Roques. À un moment donné, les comédiens arrêtent leur prestation et interrogent le public sur la façon de réagir. Les jeunes prennent la parole, proposent des solutions. Certains peuvent même monter sur scène. Dans tous les cas, c’est une réponse collective et surtout indirecte à leur propre vécu, qui leur permet de s’identifier sans s’exposer, et de trouver ensemble des modes de réaction sans se mettre en danger. » En parallèle, des rencontres multifamiliales complètent le dispositif, pour aider la structure familiale fragilisée, libérer la parole, sortir de l’isolement et partager les bonnes pratiques.

Une longue maturation pour un projet plein de promesses

De l’idée à sa réalisation, il n’y avait qu’un pas ? Pas forcément. « La mise en place a pris du temps, explique Camille Rousselet, psychologue clinicienne chargée de monter le projet. Il a fallu contacter les familles, parfois réticentes, pour leur expliquer le principe et informer les institutions partenaires. » Mais ce travail a porté ses fruits. Le 18 septembre se tient le premier théâtre-forum, dans une salle de quartier, qui rassemble une dizaine de jeunes. « Les ateliers se déroulent deux mercredis après-midi par mois de 14 h à 16 h, avec deux comédiens spécialistes du jeu avec les adolescents. Les rencontres multifamiliales se tiennent un mardi soir par mois à l’hôpital de jour pour adolescents au CHR Clemenceau », complète la professionnelle de santé.

Dans six mois, l’équipe dressera un bilan de cette expérience inédite, qui a déjà reçu une première subvention de la Fondation de France en décembre 2018 puis un prix décerné par le Fonds pour le civisme en ligne de Facebook et une dotation en février dernier. Une récompense encourageante pour saluer une initiative pleine de promesses sur un sujet qui reste encore tabou.

Pour en savoir plus :

ados.harcelement@epe14.fr